Quand tu lis, tu t'imagines, c'est-à-dire tu mets en images. C'est un acte créateur car cette mise en images t'est propre, singulière, personnelle. Chacun voit les images que cela lui évoques en fonction de son histoire, de sa culture, de son imaginaire. Parfois ces images sont précises, plus précises qu'elles ne sont décrites par les mots que nous lisons. Chacun se fait une représentation de ce qu'il lit. Pouvoir tourner une lecture en clip vidéo développe notre capacité à lire vraiment. Un clip vidéo va ajouter énormément d'éléments qui ne sont pas dans la lecture, des éléments qui viennent de toi.
Nous avons besoin de temps pour entrer dans une histoire lue. Au cinéma, une scène d'ouverture peut nous accrocher dès les premières secondes. Le livre a besoin de plus de temps pour nous installer les éléments essentiels à ce que nous puissions voir ce que nous lisons, pour nous préparer nous-mêmes à entrer dans cette histoire qui est un métissage de ce qui est écrit et de ce que cela va représenter dans notre imaginaire. Ne pas arrêter de lire avant d'avoir parcouru les trente premières pages afin de laisser une chance à cette histoire de nous rencontrer, afin de nous laisser une chance de rencontrer cette histoire.
Lire, c'est voir. Imagine arrêter un film toutes les cinq minutes pour aller faire autre chose... Au bout de trois coupures, tu risques de te désintéresser de cette histoire. C'est dire d'une histoire lue. Imagine couper l'histoire toutes les 10 pages... Laisse encore une fois une chance à cette rencontre : n'étale pas ton parcours de lecture sur plus de 15 jours et accorde-toi des plages de temps assez vastes pour vivre réellement quelque chose.
Lire, c'est oser lancer un signe au-dessus de soi et croire qu'il devienne un repère.
Lire à plusieurs, c'est se passer le miroir que l'auteur a déjà promené le long du chemin de son histoire (phrase inspirée de la citation de Stendhal sur le roman...).